Ce texte est l'oeuvre d'un certain Guiyom.
I
- Qu'est ce que tu fais Einstein ? Encore en train de bosser sur l'anti-virus ?
La tête blonde de Jérémie émergea de son écran de portable.
- Non je fais mon journal de bord, chuchota t'il.
- De bord de quoi ?
- Odd ! un journal de bord c'est un journal qui raconte la vie d'une personne embarquée dans une expédition, une aventure...tu vois ce que je veux dire ou il t'en faut plus ?
- Donc là c'est Lyoko ? supposais-je.
- Ouaip ! Je tiens ça depuis le début. J'ai aussi un journal vidéo mais il est au labo à l'usine.
- Et...je peux lire, demandais-je dans un énorme sourire qui se voulait irrésistible.
- Si ça peut t'empêcher de parler tout haut dans la bibliothèque pourquoi pas, répliqua t'il en me tendant le PC.
Je me plantais devant l'écran et commençais la lecture depuis le début. Dans l'ordre : la découverte de l'usine abandonnée, du PC, des scans juste en dessous, du supercalculateur/ordinateur encore plus bas. Je sautais quelques lignes jugeant cette partie ennuyeuse. Le prénom d'Aelita me stoppa dans ma progression.
- Alors voyons ce que tu dis de beau sur la princesse enfermée dans ses tours virtuelles.
En réponse un rougissement caractéristique sur les joues du petit génie me confirma la bonne orientation de mes pensées. Je continuais donc ma lecture devenue intéressante enchainant les paragraphes : Aelita, Lyoko, monde virtuelle, 4 territoires, blablabla...
- Ah !! « Odd della Robbia venu nous aider dans notre mission ». T'aurais pu dire ça autrement quand même ! Je sais pas un truc du style : Odd della Robbia, élément in-dis-pen-sable du groupe qui aide à déjouer les attaques de Xana le virus informatique et qui n'hésite pas à protéger ses amis au péril de sa vie.
- Figure toi que j'y ai pensé et puis j'ai décidé de dire toute la vérité rien que la vérité.
- Vexé je me retournais vers Ulrich à ma gauche en pleine partie de petits mots doux avec Yumi qui lui faisait face.
- Ulrich tu ne voudrais pas taper un peu Jérémie ? Je le trouve vraiment cruel avec moi en ce moment, dis-je d'un ton larmoyant.
- Nan, tu te débrouilles.
- Mouais c'est ça, tu préfères envoyer des mots doux à Yumi pendant...
- Odd !!
- Bon Ok je me tais, lâchais-je dépité.
Cela faisait plusieurs mois que nous formions à 4 la bande plus soudée du collège Kadic. Autant dire qu'avec nous c'est plutôt les opposés s'attirent tant nous sommes différents. Pourtant nous étions vite devenus inséparables par la force des choses. La découverte par Jérémie de l'usine nous avait tous les quatre engagés dans une vie bien différente de celle de collégiens normaux. Jonglant entre les cours et sauver le monde d'attaque d'un virus informatique. Dit comme ça, ça fait pompeux, mais une fois vécue, ça fait réel.
- Quand même si Aelita était parmi nous elle me soutiendrait, elle !
- Elle le sera bientôt, enfin je l'espère, chuchota Jérémie depuis son portable. Je touche au but je le sais.
Cela devait faire des nuits que Jérémie planchait sur le problème de l'année : comment matérialiser dans le monde réel, une entité virtuelle. Vous disposez d'un temps illimité, d'un ordinateur surpuissant et des scans servant d'interface entre les deux mondes. La solution tenait en un mot : programme de matérialisation. Programme qu'il convenait de créer, ce à quoi s'acharnait Jérémie. L'affection qu'il portait à Aelita était sans doute sa première motivation.
- Odd !!
- Quoi j'ai pensé tout haut ? demandais-je surpris.
- Bah non, c'est juste qu'on est tous prêt à aller manger et toi t'es encore assis et tu réagis pas.
Deux bonnes nouvelles : je n'avais pas pensé tout haut et c'était l'heure de manger.
L'après-midi passa très vite et à la dernière sonnerie je rappelais à Ulrich qu'il serait bien vu qu'il raccompagne Yumi chez elle. Il m'envoya un regard noir et par réflexe j'entendis un « Odd !! » résonner à mes oreilles.
- Allez Roméo, en plus tout n'as pas été rose entre vous ces derniers temps.
Je dirais même tendu le climat.
C'est du passé, on a réglé cette histoire tu le sais bien ! répliqua t'il froidement.
- Ouais d'ailleurs j'aimerais savoir ce qui s'est passé sur Lyoko, t'as rattrapé Yumi mais on a eu beau vous appeler vous ne répondiez pas...alors ?
- Au fait ? T'as pas rendez-vous avec Émilie toi ?
Changement de sujet, bien joué Ulrich.
- Si, si t'inquiètes je la vois ce soir, mais faut aussi que je vois Ophélie d'ailleurs...glissais-je.
- Je vois, tu joues sur tous les tableaux ! rigola t'il.
- C'est mieux que de rester assis à se languir de celle qu'on aime !
- C'est bon là tu me saoules !
Susceptible, comme d'habitude. Il se dirigea vers les chambres et je ne le revis qu'au souper. Le temps d'avaler quelque chose de léger, enfin de mon point de vue, et je filais au rendez-vous avec Emilie.
Je ne sais plus à quel moment mon portable sonna. J'hésite entre la gifle d'Ophélie, ou le baiser d'Émilie. Toujours est-il que je me débrouillais comme je pus et elle apprécia moyennement que je la laisse en plan au beau milieu de la salle de ciné.
Je suis à la bourre, ils vont me tuer pensais-je.... Je m'engouffrais dans le monte-charge et tandis que les portes se refermaient j'appelais Jérémie.
- Jérémie je suis là je descends direct aux scans !
- Bah y'était temps, les autres t'attendent, pour le moment on est coincé...
Arrivé dans la salle des scans je les observais rapidement, comme si le choix du scan avait son importante. Trois cylindres métalliques couleur or et s'ouvrant dans la longueur sur un espace blanchâtre...ou trois sarcophages...tout dépend de l'humeur. Rien de très réjouissant à première vue pensais-je en m'engouffrant dans l'un des trois. J'entendis vaguement Jérémie mais je connaissais par cœur le processus : Transfert, Scanner, Virtualisation.
J'eus à peine le temps de reprendre conscience que j'atterrissais souplement sur le sol. Il ne fallait surtout pas leur laisser la 1ère parole...question de style ! D'autant plus qu'ils s'étaient tous retournés et je sentis qu'ils attendaient de moi plus qu'un atterrissage parfait.
- Je vous ai manqué ? Désolé pour le retard mais vous savez ce que c'est, les filles m'adorent et veulent me garder rien que pour elle !
- Autrement dit t'as plaqué Ophélie, voulut sortir avec Émilie qui était au courant pour Ophélie donc t'es retourné voir Ophélie pour te remettre avec, elle a refusé et t'es retourné voir Émilie et pour te faire pardonner tu lui as payé le ciné, me répliqua Ulrich le sourire aux lèvres.
- Plaqué, plaqué, tout de suite les grands mots ! Bon bref qu'est ce que j'ai manqué ?
- Oh et puis non laissez moi deviner, coupais-je aussitôt. Vous avez bataillé un peu et maintenant il y a trop de monstres pour qu'Aelita atteigne sereinement la tour et la désactive afin de déjouer l'attaque de Xana. Vous avez donc besoin de mes capacités de destructeurs de Kankrelats, Frôlions et autres bestioles Xanatiques.
- Euh...non, en fait pas du tout, répondit Jérémie surpris de ma tirade.
M'apprêtant à écouter le récit de leurs aventures j'observais pour la 1ere fois le décor qui m'entourait. Je n'avais même par pris la peine de demander à Jérémie où il me virtualisait. Territoire des montagnes, pas mon préféré pensais-je aussitôt. Les tunnels de glace de la banquise étaient plus dans mes goûts. L'endroit était quasi désert, quelques rochers posés ici et là. J'entendis Ulrich me parler de blocks et j'imaginais aussitôt l'attaque qui s'était déroulée quelques instants plus tôt.
- Mais dans l'ensemble pas une forte résistance, conclut-il.
Yumi et Aelita acquiescèrent de la tête et ce fut Aelita qui continua le récit. Sa voix trahissait une pointe d'inquiétude qui me força à d'avantage d'attention.
- On est maintenant coincé ici, la tour semble être en face d'après Jérémie. T'es toujours sûr de toi là ?
- Aucun doute, la tour est en face mais elle est isolée, à la manière d'une île...
- C'est bien la première fois que ça nous arrive ! fit remarquer Aelita. D'habitude l'entrée est bien gardée mais le chemin est plutôt accessible...
- Faut croire que Xana innove... Ce qui m'inquiète c'est qu'on ne sait toujours pas la nature de l'attaque.
- Et pour le moment pas moyen de passer, d'autant plus qu'on ne voit même pas l'autre rebord, la brume est trop épaisse à cet endroit.
Contrairement au récit de la bataille précédente ce que je voyais ne collais pas à la description que m'en faisait Aelita. Cela dut se lire sur mon visage car tous les trois se retournèrent de nouveau vers le rebord de la plate forme et purent enfin apercevoir le but de notre mission.
II
Une lueur rouge parut brièvement, d'abord faiblarde puis elle irisa de plus en plus les voiles de brumes. Ceux-ci se déchiraient et semblaient s'évaporer comme par magie. Enfin la tour apparut entière. Elle reposait en effet sur une île et de notre position aucun moyen de l'atteindre n'était visible. En revanche un point noir situé au pied de la tour attira mon attention. Il n'avait pas non plus échappé à Yumi et Ulrich.
- Un mégatank !
Tous deux avaient parlé en même temps et ils ne purent s'empêcher de se regarder surpris. Chez n'importe qui d'autres cette situation aurait suscité un sourire, mais pas chez eux. Amusé, je vis Ulrich détourner son regard de celui de Yumi. Il ne changerait jamais !
- Vous avez parlez en même temps faut faire un vœu c'est la tradition, m'exclamais-je ! Vous trompez pas, ajoutais-je avec un clin d'œil.
- Odd !!
- Ah encore une fois, dites donc vous êtes fortiche à ce jeu là.
C'était trop tentant et je ne pouvais pas m'empêcher de les taquiner. D'autant plus que bien que j'étais la cible immédiate de leurs critiques je savais pertinemment que chacun des deux y trouvait son compte et espérait que mes paroles feraient réfléchir l'autre.
- Bon c'est pas tout ça mais je vous rappelle qu'il y a une tour à désactiver et le fait qu'on ne connaisse pas la nature de l'attaque ne doit pas être une excuse pour traîner, au contraire.
- Jérémie a raison, continua Aelita. Mais pour le moment je ne vois pas ce que l'on peut faire...à moins de voler ou...
- ...de créer le chemin, l'interrompit Yumi.
Tour à tour nos regards se portèrent sur Yumi puis sur Aelita. Son pouvoir de création lui permettrait de prolonger le chemin et de rejoindre la plate forme sur laquelle s'élançait la tour. Devinant nos mines sceptiques Jérémie reprit la parole.
- Non, non pas question, la plate-forme est à plus de 100m et le pouvoir d'Aelita ne lui permettra jamais de créer un tel pont ! C'est trop risqué, on risque de l'affaiblir et Xana n'aura plus qu'à lancer quelques monstres et le tour sera joué.
- On n'a pas le choix Jérémie, c'est ça où rentrer à la maison sans désactiver la tour, le coupa Aelita.
Comme d'habitude les désaccords entre le couple de petits génies était suivis d'un long silence. Il faut dire qu'enchaîner après eux impliquait de trancher la question en usant d'un argumentaire assez efficace. Bien souvent je m'abstenais donc de poursuivre. Ce fut Ulrich qui rompit le silence.
- D'un autre côté, dit-il, on a jamais essayé sur une si longue distance.
- Alors là Ulrich chapeau, j'applaudis, c'est simple comme réponse mais efficace !
Ulrich me lança un regard incrédule...encore une fois j'étais seul dans mon délire. Son idée n'était pas bête et avant que Jérémie ne la mette en doute il fallait le soutenir...le rôle du meilleur ami !
- Dans tous les cas il a raison, affirmé je d'un ton convaincant. Aelita n'a jamais eu à forcer son talent. Qui plus est on lui demande pas un chemin de 5m de large, 1 mètre suffira on a le sens de l'équilibre maintenant.
Yumi embraya aussitôt sur mes paroles.
- Et pas besoin non plus d'une épaisseur de plusieurs mètres, une allée assez solide pour supporter notre poids ça suffira. Et si au pire elle n'arrive pas au bout j'utiliserais ma télékinésie pour les transporter un à un sur la plate forme. J'ai encore tous mes points de vie et de l'énergie à revendre, j'y arriverais sans problème.
- Je sais pas, c'est pas très prudent quand même...en plus je le sens pas ce truc, y'a quelque chose qui cloche.
Devant notre silence approbateur, Jérémie laissa échapper un soupir qui signifiait aux oreilles de tous « bon, allez d'accord, mais faites gaffe surtout ! »
- Ne commence pas au bord Aelita, ça te fera gagner quelques mètres que l'on peut sauter. Et ne finit pas non plus au bord, de toute façon ça sera une défense efficace au cas où des monstres voudraient nous suivre.
Hochant de la tête aux paroles de Yumi je vis Aelita se mettre à genou et progressivement un rebord apparut devant nous à quelques mètres. Celui-ci s'allongea rapidement et fila vers l'île de la tour. Arrivée aux deux tiers je vis Aelita présenter les premiers signes de faiblesse. Elle faillit arrêter mais repris sa création. Cependant le chemin devint plus fin pour ne plus faire que quelques dizaines de centimètre au bout. Yumi compris qu'Aelita fatiguait trop et lui ordonna de s'arrêter. Cette dernière se laissa tomber sur le côté l'air épuisé.
- Comment va Aelita ? s'enquit aussitôt Jérémie.
- Ça ira, le rassura t'elle d'une voix faiblarde.
- En tout cas c'est bien joué le chemin est apparu sur mon écran. Faites gaffe quand même en dessous c'est le vide numé...
- Oui, oui on sait !
- Je passe la première fit Yumi, Aelita tu suis, Odd puis Ulrich c'est ok pour vous ?
- Pas de souci pour moi répondis-je.
J'en profitais pour jeter un regard vers Ulrich dont le teint était devenu bien pâle.
- Ça va Ulr...
Avant d'avoir pu finir ma phrase celui-ci me coupa d'un ton sec.
- Passe devant dépêche !
D'un bon, Yumi avait déjà enjambé les premiers mètres de vide et se retrouvait sur le chemin suspendu qui de tout évidence tenait le coup.
- Je commence à avancer et on fait tous pareil histoire de répartir les charges cria t'elle.
Aelita la rejoint, puis ce fut mon tour. J'arrivais à 4 pattes sur le chemin. Y'a pas à dire, les félins c'est quand même la classe pensais-je. J'avançais de quelques mètres et me retournait vers Ulrich. Celui-ci prit son élan et sauta à son tour. A son arrivée, il vacilla quelque peu et je compris aussitôt le problème. Sous nos pieds le vide s'étendait et il n'existait aucune manière de ne pas le voir. Autrement dit, un supplice pour quiconque aurait peur du vide. Je m'apprêtais à lui lancer une remarque plein de bon sens mêlant son teint et sa capacité de plaire à Yumi mais je me retins à temps. Il n'avait vraiment pas l'air bien et me moquer de lui, même gentiment n'aurait rien arrangé.
- T'auras qu'à fixer mon dos, lui lançais-je.
Mon ton sérieux dû le surprendre puisque l'espace d'un instant je le vis oublier sa peur du vide.
- Je marche devant toi, et toi tu regardes fixement devant toi, à savoir moi.
- En gros j'utilise ta coupe de cheveux comme repère ? Si on m'avait dit que ta tignasse m'aiderait un jour...
Je le vis sourire et y décernais un remerciement silencieux. Je me mis aussitôt en route, mieux valait ne pas inquiéter les filles. J'aurais tout le temps d'évoquer ce passage en présence de Yumi de retour sur terre. A cette idée je retrouvais le sourire et me mis résolument en marche. Les filles étaient 50m devant moi tandis qu'Ulrich me laissa prendre une dizaine de mètres d'avance.
III
Tandis que j'avançais je repris contact avec Jérémie.
- Toujours rien sur la nature de l'attaque Einstein ?
- J'avance. Il semblerait qu'il n'y ait rien dans le monde réel, mais je vois mal comment...à moins que....On a un problème faites gaffe à vous !! Hurla Jérémie.
Il s'agissait non pas d'un mais de trois problèmes. Le premier concernait la largeur du chemin. Il se rétrécissait finalement bien plus vite que prévu et si cela ne me posait pas problème je devinais l'angoisse montante d'Ulrich. De même son épaisseur diminuait et je devinais que les filles bien plus avancées que moi devaient déjà apercevoir la mer numérique en transparence.
Les deux autres problèmes prenaient la forme de boules noires. Un rapide coup d'œil devant et derrière m'informa de la présence de deux mégatanks aux rebords de chaque plate forme. Sans chemin il ne pouvait pas avancer vers nous mais ils s'ouvrirent en deux. Et c'est tout. Aucun des deux ne tira.
- Euh...ils nous font quoi là Jérémie ?questionna Yumi.
- Aucune idée, mais toujours est-il que vous ne pouvez plus bouger de-là !
- Odd, t'arriverais à atteindre le premier ? Je vais tenter d'atteindre le deuxième sur l'île avec mon éventail. Aelita reste en retrait par contre.
Suivant l'exemple de Yumi je retroussais chemin passant à nouveau devant Ulrich.
- Ça va mon vieux ? Tu tiens le coup ?
- Ouais je crois que je m'habitue mais si on pouvait se dépêcher de dégager de là je me sentirais beaucoup mieux je pense.
- Je vais voir si je peux faire sauter la bouboule et on avance.
J'avançais encore de quelques mètres quand le mégatank se mit à rougir.
Surpris je fis marche arrière et sentis le souffle de la déflagration passer près de moi. Je m'attendais à une deuxième salve mais rien ne vint. Le mégatank restait ouvert mais ne se chargeait plus.
- Il nous tient en joue Jérémie ! Pas moyen de les approcher mais par contre ils ne veulent pas nous dévirtualiser ici on dirait. C'est comme si ils...
- Ils attendaient quelque chose ! Jérémie avait de nouveau hurlé mais sa voix traduisait plus l'impuissance qu'autre chose. Ça arrive droit vers vous !
Ulrich m'avait déjà rejoint, semblant oublier sa peur du vide. Je n'eus pas le temps de voir l'essaim de frôlions qui arrivait. A peine le premier avait il vrombit au dessus de ma tête que mon esprit se troubla tandis que la voix d'Ulrich se fit lointaine. Je me vis tomber droit dans la mer numérique. Je n'étais pas seul. Ulrich plongeait lui aussi, dos à la mer, face à moi. Encore quelques instants et je le rejoignis. Je n'eus le temps de voir qu'un sourire de sa part et une douleur sourde m'envahit.
Quelques secondes plus tard, j'étais à nouveau sur le chemin aux côtés d'Ulrich. Le ciel s'était rempli d'une dizaine de frôlions tous alignés de part et d'autre du chemin nous tenant en joue. Je savais ce qui allait se passer. Un tir chacun et nous tombions, projetés dans le vide.
- Jérémie, j'ai eu une vision. Ulrich et moi allons tomber, faut faire quelque chose, se tirer d'ici en vitesse !!
Yumi m'entendit hurler à l'autre bout du chemin. Elle tourna son visage vers nous et se mit à courir aussitôt en compagnie d'Aelita dans notre direction. Elle était mon amie, mais je savais qu'Ulrich motivait la rapidité de sa course. Un instant un sourire vint à mes lèvres et je trouvais le courage de m'adresser à Ulrich sur le ton de la plaisanterie.
- Tout ça pour toi !
Malgré les événements il rougit ce qui rendit la situation encore plus étrange. Nous savions ce qui allait se passer pour nous deux mais malgré tout rien ne changeait. Comme quoi certains sentiments l'emportent toujours sur la peur.
La dernière fois que mes visions étaient apparues elles s'étaient révélées exactes et conduit Yumi dans le vide numérique. Cet événement justifiait à lui seul l'inquiétude grandissante qui s'emparait de nous.
Un bruit familier nous fit redresser la tête, les frôlions relevaient leurs dards les pointant vers nous, tandis que d'autres arrivaient et prenaient place. Ulrich avait déjà dégainé son sabre prêt à parer les coups. Mais ils nous tenaient en tenaille. Quelque soit le coup que l'on éviterait, l'autre côté nous aurait à coup sûr. Des frôlions s'était même placé au milieu du chemin empêchant la progression des filles.
- Sautez sur la plate forme, ordonna Jérémie ! De toute façon si le mégatank vous touche vous serez dévirtualiser sur le coup c'est ce qu'il y a de mieux ! On avisera après pour la tour !
Je me tournais vers celui-ci et vit que les frôlions barraient également le passage pour un ultime saut à une extrémité ou à l'autre.
- C'est jouable, murmura Ulrich. Si je lance bien mon sabre et toi tes flèches on peut passer. Yumi s'en sortira avec son éventail.
- Et Aelita ? ajoutais-je.
Un nouveau silence se fit, j'entendis nettement la respiration saccadée de Jérémie. Si nous nous pouvions être dévirtualisés sous les tirs de Xana il n'en était pas de même pour Aelita. Sa seule solution était de rejoindre la plate forme.
- Mais c'est pas vrai, je peux rien faire d'ici !
L'angoisse de Jérémie le submergeait et se transformation en panique...ce qui n'aidait pas à la réflexion. Heureusement Yumi savait garder la tête froide en toute circonstance et ses idées se révélaient souvent brillantes.
- On va tenter quelque chose, trancha Yumi. Mon pouvoir de télékinésie peut me servir pour dévier le tir du mégatank. Si je lui file mon éventail elle pourra parer les tirs de frôlions. Risqué mais elle peut passer.
- Jérémie, on est bloqué de toute façon, faut qu'on prenne une décision ou on y passera tous.
Aelita savait étrangement gardé son calme dans ses moments là et ses paroles laissaient peu de chances à Jérémie pour d'autres options.
- C'est pas comme si on avait le choix, conclut Ulrich d'un ton ferme. On va tenter le coup Jérémie.
Mais à cet instant je le vis se retourner, je savais qu'il regardait Yumi et à travers son regard je sus que tout ce que j'avais deviné au cours des derniers mois était vrai. Je regardais à mon tour Yumi et y vit la même lueur et le même sourire. Certaines personnes ont la chance de pouvoir tout se dire à l'aide d'un regard. Moi pas. Et jugeant le moment critique je coupais court à cette scène. Nous hochâmes tous de la tête, sachant tous que ce que nous allions faire était sans doute l'une des attaques les plus osées de notre vie de Lyoko-guerrier. Nous mettions en jeu notre vie bien plus que d'habitude. Je me surpris à avoir peur. D'habitude j'aurais déjà sauté sur le mégatank fidèle à mon image de marque...mais là. Peut-être était ce parce que j'étais impliqué dans la vision ?
- A tout de suite.
Aelita avait murmuré ça et je sentis mon cœur cogner plus fort dans ma poitrine. Les derniers frôlions arrivaient et désormais c'était une centaine de bestioles volantes qui s'offrait à notre vue.
IV
Le bord du chemin était à une dizaine de mètres. Le mégatank était en place toujours ouvert mais protégé par une barrière de frôlions.
-Si on passe les frôlions alors il pourra nous tirer dessus et on se dévirtualisera sans problème.
Ulrich ne répondit pas tout de suite. Son teint pâle avait maintenant disparu et sa mine affichait une expression de sérieux jamais égalé.
-Odd, si jamais on ne passe pas ce mur et que le mégatank nous loupe, sache que même si des fois je t'ai dis des trucs pas sympa... t'as été le meilleur ami dont je pouvais rêver.
Je restais muet. D'habitude j'aurais sorti une blague, mais là c'était la première fois qu'on me disait une chose pareille et avec une telle sincérité. Je me forçais à reprendre un ton enjoué mais sa phrase m'avait touché.
-Merci mais t'en fais pas on va s'en tirer, mes visions sont pas toujours correctes je suis sûr. Et à ce que je vois mes ronflements ne te dérangent pas tant que ça hein !!
Il ne put s'empêcher de rire et reprit aussitôt son sérieux. Il était temps d'attaquer.
Tout se passa très vite. Encore éloigné du bord je tirais une première salve tentant de libérer un passage. La majorité firent mouche explosant les frôlions qui ne tentèrent même pas d'esquiver. Je compris que l'occasion ne se représenterait pas. J'entendis une explosion à l'autre bout du chemin et pensa que Yumi s'en sortait bien. Il ne me fallut que quelques secondes pour comprendre que les autres monstres se chargeaient et dans une poignée de secondes leurs tirs nous atteindraient. Je me mis à courir et j'entendis Ulrich derrière mon dos en faire autant. Pas besoin d'atteindre l'extrémité du chemin, Aelita avait sous estimé notre capacité de saut, il me suffisait d'être à deux mètres du bord pour m'élancer. Je tirais une nouvelle salve et c'est à ce moment que j'entendis le tir des frôlions de même que le cri de Jérémie.
Aucun ne me toucha. Aucun ne toucha Ulrich. Et je compris quelques instants plus tard qu'aucun des tirs ne nous étaient destinés. Tous avaient atterris sur la plate-forme créée par Aelita. Une centaine de tirs s'étaient abattus sur ce frêle chemin. Au moment même où je voulus prendre mon impulsion le sol se déroba. La moitié des tirs auraient sans doute suffi mais Xana avait été prudent, voir intimidant. Mais surtout intelligent.
Mon pied ne trouva aucun support pour me donner l'élan nécessaire et je basculais en avant la tête la première. J'avais peur de me retourner car je savais ce que j'allais voir. Finalement j'effectuais un demi-tour et je me rendis compte de mon erreur. Je ne savais pas tout.
Ulrich chutait quelques mètres plus bas. Mais derrière Aelita et Yumi chutaient elles aussi. Je me sentis totalement désemparé et seule la voix de Jérémie me fit prendre conscience que je perdais des secondes précieuses. Celui-ci ne cessait de crier le prénom d'Aelita. Yumi hurla à son tour et je vis Aelita déplier l'éventail. Je compris aussitôt leurs actes. Je reportais mon regard sur Ulrich. Celui-ci s'était éloigné de moi et chutait une dizaine de mètres plus bas. La voix de Jérémie ne cessait de résonner et il me fallut toute ma concentration pour tendre mon bras et viser Ulrich. Notre vitesse ne facilitait pas les choses, d'autant plus que les nappes de brouillards non contents de dissimuler la mer numérique créaient des mouvements d'air incontrôlables. La flèche partit. Suivi d'aucune autre. J'étais à sec. Je suivais du regard la première flèche. Je vivais la scène au ralenti et lorsque la flèche frôla Ulrich je m'entendis hurler de rage. L'espace d'un instant je vis la panique dans ses yeux puis il écarta ses jambes et bras et j'eu aussitôt l'impression qu'il avait subitement ralentit. Je me rapprochais fortement de lui et je ne contrôlais rien. Je regardais brièvement vers Aelita et la vit viser Yumi. Je vis l'éventail se diriger vers elle, et lui heurter le bras. Ce n'était pas suffisant. J'entendis les filles crier dans notre direction mais je ne compris pas leurs paroles. Je tournais à nouveau mon regard vers Ulrich devenu tout proche. J'eus l'impression de revivre ma vision. Tout c'était donc bien passé.
-Je suis désolé Ulrich, je t'ai loupé...
- Mais moi pas !!
La surprise, puis la douleur. Ce fut tout ce que je ressentis. Surprise à ces mots, douleur lorsque de part en part mon ventre fut traversé par le sabre.
Bien que me dévirtualisant je vis son visage une dernière fois. Un léger sourire dissimulait une peur certaine. Un peu de soulagement, celui d'avoir fait mieux que moi. Il ne m'avait pas loupé, lui.
V
Je me réveillais en sursaut, ruisselant de sueur. Je venais de cauchemarder. Je me rallongeais dans mon lit fixant le plafond et chassant les dernières images de cette nuit. Trouvant à nouveau le sommeil je basculais sur mon côté gauche et me mis en boule. J'ouvris les yeux une dernière fois et je les sentis s'écarquiller. Mon cœur battait à tout rompre.
Ulrich n'était pas dans son lit. Ce n'était pas un cauchemar, tout me revint. Une paire de claque, des sanglots, les égouts et le trou noir.
Je sortis de ma chambre comme un fou et couru jusqu'à la chambre de Jérémie. J'entrais avec fracas et reprenant mon souffle je vis mon ami penché sur son PC. Il se retourna lentement, les yeux rouges, gonflés par les larmes et je sus que j'avais raison. Je m'effondrais à nouveau par terre tandis que Jérémie referma la porte.
- J'ai cru que....c'était qu'un cauchemar....mais c'est réel n'est ce pas ? Tout ce que j'ai vu cette nuit s'est bien passé ?
Je ne pense n'avoir jamais pleuré devant mes 4 amis, même Ulrich, mais là j'en avais rien à faire. Je sentis toute la tension accumulée sur Lyoko se relâcher.
- Oui tout est réel. Enfin je suppose que dans ton rêve tu as revu la mission sur Lyoko ? me répondit Jérémie posément.
- Oui, je chutais avec les autres et j'ai loupé Ulrich, de même qu'Aelita n'a pas eu Yumi.
A ces mots je redressais la tête le regard plein d'espoir et scrutais son visage fatigué. Il comprit aussitôt qu'il me devait une explication.
- Vous avez chuté tous les quatre. C'était ça l'attaque de Xana. Détourner assez d'énergie pour créer une armée de frôlions capables de dévirtualiser ce chemin et de tous vous éliminer d'un coup. Après votre chute la tour s'est elle-même désactivée. Les filles...n'ont pas...
Je sentis dans sa voix les sanglots étranglés et il respira fortement. Je distinguais ses larmes qui coulaient, éclairées par la lueur du PC.
- Les filles sont tombées dans la mer numérique, tout comme Ulrich, quelques secondes après qu'il t'ait dévirtualisé.
- Aelita n'a pas eu le temps de rejoindre la plate-forme ?
- Yumi lui avait donné son éventail et Aelita s'en est servi pour tuer suffisamment de frôlions. Yumi avait déjà dévié le mégatank mais le chemin s'est écroulé et Yumi n'a pas su utiliser sa télékinésie sur Aelita pendant sa chute.
Je ne faisais qu'apprendre ce que j'avais deviné durant ma chute. Rompant le silence qui s'installait je séchais mes larmes et parlais d'une voix méconnaissable.
- Et maintenant ? murmurais-je.
Un silence profond se fit et je compris à l'expression de Jérémie que la suite n'allait pas me plaire.
- Maintenant il y a deux étapes, expliqua t'il.
- La rematérialisation ! Comme lorsque Yumi était tombé dans le vide, tu nous l'avais ramené. Donc tu peux le refaire pas vrai ?? dis-je en m'emportant brusquement.
- Ça c'est la deuxième étape. En effet c'est le même programme et c'est également celui sur lequel je bosse depuis le début pour rematérialiser Aelita dans notre monde. Et j'ai bien avancé, mais il me reste quelques bonnes heures de travail...
- Et la première étape ? m'inquiétais-je.
- J'en suis pas encore sûr mais je pense qu'il faut retrouver les données de chacun des trois et les indiquer au programme de rematérialisation. Et jusque là nous n'avons plus Aelita ce qui veut dire...
- Qu'en cas d'attaque nous n'avons plus de quoi nous défendre, le coupais-je.
- Et l'attaque ne devrait pas tarder et je n'aurais jamais finit d'autant plus que je suis tout seul maintenant...sans Aelita...
Il ne finit pas sa phrase qui resta coincée au fond de sa gorge.
- Xana a calculé son coup, il lui suffit simplement de reprendre des forces et nous sommes coincés.
- Mais il ne sait pas que tu peux rematérialiser ! ajoutais-je plein d'espoir. Il prendra peut-être d'avantage de temps dans ce cas.
- Possible mais si jamais l'attaque a lieu tu sais ce que cela signifie, lâcha t'il des sanglots dans la voix.
Débrancher le supercalculateur. Nous savions tous deux que c'était la solution mais aucun ne souhaitait en parler. Je savais également ce que cela impliquait et à en croire les larmes sur les joues de Jérémie, il pensait à la même chose que moi.
- Qu'est ce que je peux faire pour t'aider ? Je suis nul en informatique mais des petites choses je pourrais me débrouiller, promis ! T'es pas tout seul Jérémie, on peut s'en sortir. Dis-moi ce que je dois faire.
- J'en sais rien, bafouilla t'il. Je ne sais même pas si j'aurais réussi avec elle.
Je sentais bien que notre seule chance se trouvait là et il ne fallait pas lâcher. Jérémie se décourageait rarement mais quand c'était le cas ce n'était pas à moitié. D'habitude c'était Aelita qui le remotivait ou Yumi, mais maintenant il n'y avait que lui et moi. Et je devais bien ça à Ulrich et aux autres.
- Jérémie t'étais pas sur Lyoko, dis-je.
- T'insinues quoi là ? répliqua t'il aussitôt. Que j'ai rien fait pour les aider ? J'étais contre ce chemin virtuel, je te rappelle ! C'est pas moi qui ai eu la vision, c'est toi ! Oui je n'étais pas sur Lyoko, mais peut-être que si on avait inversé les rôles moi j'aurais...
- T'aurais fais mieux que moi ? Tu les aurais sauvés ? complétais-je.
Je le vis se mordre la lèvre, conscient de ses paroles. Jérémie passait toujours pour l'élève gentil, poli, sérieux, celui qui ne ferait pas de mal à une mouche mais sa facilité à s'exprimer lui donnait cette capacité de vous blesser en alignant trois mots. Pour peu qu'il lâche ce qu'il avait sur le cœur et vous vous retrouviez le souffle coupé. Je commençais mal mon soutien moral. Je voulais nous le remonter et finalement je me faisais descendre. Faisant abstraction de ses remarques je poursuivais mon idée.
- Non, non, ce que je veux dire c'est que tu n'as pas vu ce que j'ai vu. Je les ai vu chuté et je n'ai rien pu faire. J'étais impuissant, même ma flèche...
L'espace d'un instant je la revis frôler le corps d'Ulrich. C'était pas le moment de penser à ça.
Chacun de nous savait que la mer numérique signifiait la mort. Mais depuis que tu as su faire revenir Yumi on sait aussi que si l'un de nous est capable de tout c'est bien toi. Moi j'ai raté mon coup sur Lyoko, on a tous échoué, mais toi on sait que tu y arriveras. Ulrich m'a dévirtualisé et j'ai vu sur son visage qu'il comptait sur moi. Pas pour m'emparer du pc et devenir le nouveau Mozart de l'informatique, mais pour t'aider toi. Et je sais que les filles comptent sur nous tous. On peut le faire Jérémie. Et là on perd du temps.
Mon petit discours avait fait son effet mais pas seulement sur Jérémie, moi-même je me sentais ragaillardi. Je pensais sincèrement qu'il existait un espoir. Je me forçais à illustrer ça par un sourire d'encouragement qui fit mouche. Comme quoi, fils d'artiste, ça s'improvise pas.
Un bip sonore résonna dans la chambre. La montre de Jérémie indiquait 3h. Il me fallut quelques instants pour me rendre compte que nous étions allés sur Lyoko à 22h. Et encore quelques instants pour prendre conscience qu'au moins 3h s'étaient écoulées depuis ma chute sur Lyoko et mon réveil. 4h dont je n'avais aucun souvenir. Pas même celui d'être rentré à Kadic.
- Y s'est passé quoi après ??
Je dus avoir l'air un peu paniqué puisque Jérémie eut un rire nerveux en m'entendant.
- Il m'a fallu un certain temps pour reprendre mon calme et avoir une attitude, disons rationnelle et posée.
A voir ses yeux je devinais que la chose n'avait pas été facile.
- Quand j'ai vu que tu ne remontais pas des scans je suis allé te chercher. Tu étais inconscient, sans doute le choc. Au début j'ai paniqué encore plus, j'ai vraiment cru que j'étais seul pour de bon !
Ses yeux traduisaient très bien ces propos et je trouvais qu'à un autre moment cela aurait sans doute été une de mes meilleures blagues.
- J'ai ensuite bossé sur l'unité central, je ne saurais plus te dire dans quel ordre, entre l'attaque, la recherche d'indice...je suis resté 2h avant de...j'avais rien réussi et l'impression de perdre mon temps. J'ai réussi à te réveiller et ce fut pas chose facile, on est rentré tant bien que mal, tu étais totalement désorienté et j'ai réussi à te déposer dans ta chambre où tu t'es réveillé 2h plus tard. Et depuis j'ai bossé.
Au fur et à mesure de ces paroles les souvenirs me revenaient plus nettement mais je prenais également conscience de l'ampleur de notre tâche.
Le principal problème me sauta aux yeux. Nous étions samedi matin, 3h00. Dans exactement 4h Yumi ne descendrait pas prendre son petit déjeuner avec sa famille.
- Yumi, glissais-je en prenant ma tête entre mes mains. Une boule au ventre me noua l'estomac et je sentis un violent afflux d'adrénaline me parcourir.
Jérémie ne perdit pas son calme. Au moins nous étions deux et pour le moment on s'entraidait à tour de rôle.
- Je vais m'occuper de la partie informatique et toi la partie...logistique. Mets par écrit tout ce à quoi on doit penser. Il va manquer deux élèves à Kadic et il ne faut rien laisser au hasard.
VI
Prenant mon air le plus convainquant j'approuvais et me mis aussitôt à penser à la meilleure manière de prévoir...l'imprévisible. Très vite je sus comment m'organiser. Je pris deux feuilles attribuant à chacun les prénoms des deux absents. Et quelques minutes plus tard les heures de la journée ainsi que plusieurs colonnes étaient tracées. Une pour l'occupation principale, une pour les personnes concernées par cette occupation et enfin une pour ce qu'il fallait entreprendre pour gérer les éventuels problèmes. Remplissant les plannings j'éprouvais à nouveau un drôle de sentiment. J'organisais la journée de deux de mes amis qui étaient disparus et ce peut-être à tout jamais. Pourtant je tâchais de mettre cette idée dans un coin de ma tête et de prendre ça comme une routine...depuis nos débuts sur Lyoko il avait déjà fallut mentir, leurrer, improviser, jouer la comédie, planifier, s'adapter.
Une fois encore c'est ce que nous faisions, et tandis que j'entendais les doigts de Jérémie rebondir sur les touches du clavier je griffonnais quelques mots sur une page. Enfin je m'allongeais une minute sur son lit. La fatigue m'avait quitté et je savais que j'allais devoir rester éveiller un long moment.
Jérémie se retourna vers moi et je crus bon de faire le point. Je pris aussitôt la parole tentant de rester neutre à défaut d'être joyeux.
- Je commence par le facile. Pour Ulrich pas de souci on a deux heures de sport et c'est tout. Un billet maladie et le tour sera joué. D'autant plus qu'Ulrich est plutôt bien vu par Jim. En revanche après si Jim ne le voit pas de la journée ça n'ira pas. J'ai pensé que ses parents pourraient venir le chercher pour le week-end ? Je t'ai même écrit un petit texte pour M. Delmas, rajoutais-je le sourire au coin des lèvres. Sinon le reste ça ira, Ulrich traîne toujours avec nous donc pas de problème. Pour Yumi c'est plus compliqué. Il faudra justifier son absence auprès de ses parents avant leur réveil et quasiment en même temps au collège. Pareil je t'ai fait un petit texte, dans le plus pur style japonais, évidemment.
- Evidemment, reprit-il en souriant, j'en attendais pas moins de toi.
Une partie de la tension qui régnait s'en alla d'un coup mais je savais que ce n'était que provisoire. Quelqu'un a dit un jour qu'il fallait rire de tout. Je le compris très bien à cet instant. D'autant plus que la suite du programme était bien plus ambitieuse...et risquée.
- Le premier problème c'est de faire croire aux parents de Yumi que leur fille est chez elle...mais déjà parti en cours quand ils se lèveront.
- Et t'as trouvé la solution ?
- S'introduire chez Yumi.
- Tu veux te déguiser en Yumi ??
- Mais non ! Mais si je laisse un mot disant que je suis déjà parti en cours, je laisse un bol nettoyé, quelques miettes de pain et je claque la porte légèrement alors ils croiront que je suis déjà au collège.
- Ils n'y croiront jamais.
- Ça on s'en fout c'est pas notre problème. Ils se diront qu'elle a petit copain qu'elle veut le voir avant mais ça, ça la regardera quand elle rentrera chez elle.
- Si elle ren...
- Elle le fera.
Plus le temps avançait plus je me surprenais. Odd le comique, le turbulent, le roi de la blague savait faire preuve d'un sang froid et d'un sérieux qu'il ne se connaissait même pas.
- Y'a un problème quand même. Comment tu comptes t'introduire chez Yumi ?
Je reconnaissais bien là mon ami, théorie et esprit critique 20/20, esprit pratique 0.
- De la même manière qu'elle en est sortie, Einstein. Par sa fenêtre !
Il hôcha la tête, reconnaissant par là mon raisonnement, mais son regard laissait à penser que quelque chose ne lui allait pas. Pas dans le plan, quelque chose de moral.
- Tu te rends compte de ce que tu, enfin on va faire croire à ses parents ? glissa-t-il pris par des remords.
J'allais me faire passer pour une Yumi, qui était potentiellement...
Je ne terminais pas ma pensée, ce n'était pas le genre d'idée dont il fallait s'encombrer l'esprit.
En accord avec Jérémie je m'accordais une courte sieste de 2 heures étendu sur son lit. Il m'avait assuré qu'il était capable de tenir éveillé encore un moment...à mon avis il avait déjà du passer quelques nuits blanches sur son pc. Et de mon point de vue qu'Aelita y jouait un rôle...
Jérémie me réveilla effectivement deux heures plus tard. Il avait l'air soucieux mais préféra en parler plus tard. Certains ne préfèrent pas en parler du tout pensais-je...
Sortir de Kadic était devenu d'une facilité déconcertante. Je me payais même le luxe de passer par l'entrée principale. Il était 6h15, les rues commençaient doucement à s'animer, les premières voitures, quelques passants qui sortaient de la boulangerie. Ah les croissants ! Faut pas que je les loupe ce matin ! Je marchais encore et regardais les quelques personnes présentes. Depuis le début de nos aventures sur Lyoko je m'étais peu intéressé aux gens de l'extérieur. Il est étonnant de penser que l'on sauve la vie de ces gens sans qu'ils ne le sachent et qu'eux même revivent des passages de leur vie sans le savoir également. Y compris nos parents pensais-je. Je m'aperçus finalement que j'étais arrivé et comme prévu la fenêtre de Yumi était entrouverte. Il était 6h30, juste le temps de monter, fermer la fenêtre, faire le lit, descendre, trouver un bol, de quoi grignoter et repartir.
Première étape : l'escalade !
L'arbre face à sa chambre était le plus prometteur et je pus facilement me hisser sur la branche qui donnait face à sa chambre. Heureusement son quartier était calme et personne ne m'avait remarqué...enfin j'espérais ! Me penchant suffisamment j'atteignis le rebord situé en dessous de sa fenêtre et prenant appui avec mon pied je m'agrippais à l'encadrement poussant la fenêtre par la même occasion. Quelques secondes plus tard la fenêtre était refermée et j'étais debout dans sa chambre. Le soleil levant du mois de juin commençait à éclairer sa chambre et j'y voyais relativement bien. Le lit, une penderie, un bureau avec ses affaires de cours. Sérieux et simple à l'image de Yumi. Je refis le lit rapidement et m'approchait de la porte. Pas un bruit ne filtrait. Je l'entrouvris légèrement guettant le moindre grincement mais elle resta silencieuse. J'aurais apprécié d'être un vrai félin à ce moment là. Je commençais à m'aventurer dans le couloir, repérant d'avance les endroits potentiels où me cacher. Autant dire qu'il n'y en avait pas. Finalement je refermais la porte et commençais ma traversée accélérant mon rythme. Les escaliers se descendirent tout seul et ce ne fut qu'à la dernière marche que je réalisais que j'avais omis un détail. Yumi était censée aller en cours, et contrairement à moi elle n'oubliait jamais ses affaires et surtout pas chez elle en évidence sur son bureau. Je me maudis intérieurement et repris mon ascension vers sa chambre. Je regardais consciencieusement mes pieds essayant de deviner l'endroit où les marches craqueraient le moins. Un léger bruit me fit relever la tête. En haut des marches se tenait Hiroki.
VII
Au même moment nous sursautâmes et je me rattrapais de justesse à la rampe.
- Mais qu'est ce que...
Il avait dit sa phrase en respirant à plein poumons et il ne la finit pas. Il ne m'avait jamais rencontré, moi-même je ne le connaissais que par les descriptions de Yumi. Je savais qu'il serait au collège à la rentrée prochaine. Il fallait à tout prix le rassurer.
- Je suis le p'tit copain de Yumi ! débité-je d'un trait.
Il ne fallait pas que je parle et encore moins lui. Mettant mon doigt devant ma bouche je le suppliais des yeux, m'attendant à voir débouler son père ou sa mère. Finalement il se reprit étonnamment vite et m'incita à le suivre dans sa chambre. Dans ma tête je préparais déjà mon discours tout en cherchant ce qu'il valait mieux dire. Il prit la parole en premier.
- Tu t'appelles Ulrich c'est ça ?
Ne pas tomber dans le piège, un peu trop évident.
- Oui c'est ça ! Yumi t'as parlé de moi ?
- Non j'ai piqué son journal intime et ça parle beaucoup de toi. Par contre tu corresponds pas trop à l'image que je me faisais de toi...
Tu m'étonnes pensais-je. Un instant j'imaginais le couple Yumi - Odd. Pour sûr le scoop de la décennie au Kadic News !
- Ecoute moi bien je n'ai pas beaucoup de temps et encore moins pour t'expliquer maintenant. Je te rassure je joue absolument pas les cambrioleurs mais là j'ai besoin de ton aide.
Il me regarda guettant la suite de ma phrase.
- On va y aller une chose à la fois. Pour le moment ce que tu dois savoir c'est que Yumi n'est pas dans sa chambre et il faut que je fasse croire à tes parents qu'elle est déjà partie au collège avant qu'ils ne se lèvent. Peu importe la raison mais juste leur faire croire qu'elle a passé la nuit ici....
Et mince j'en avais déjà trop dit et je m'attendais à un bombardement de question mais voyant le sourire d'Hiroki je devinais aisément ce qu'il allait me répondre.
- Alors qu'elle l'a passé où ?
Yumi allait me tuer quand elle reviendrait.
- Euh, ben en fait elle l'a passé avec nous à Kadic, y'avait une soirée et elle s'est endormie là-bas.
- Ce qui explique qu'elle ne soit pas revenue elle-même ? ironisa-t-il.
Là ça se compliquait, un peu trop perspicace le petit frère. Je commençais à comprendre Yumi quand elle nous racontait ses disputes avec Hiroki.
- On s'est fait coincer par le surveillant, ou du moins Yumi. Et comme il était 2h du mat' il a choisi de la faire dormir à l'infirmerie et de surveiller la porte...évidemment je te raconte pas ce qu'elle risque de prendre mais on va essayer de convaincre Jim, enfin le surveillant d'être gentil. Donc il reste une chance que ses parents ne savent rien du tout...sauf s'ils découvrent ses affaires ici.
Mouais, ajouta t'il d'un air suspicieux.
Mon histoire ne tenait pas vraiment debout mais j'espérais qu'elle marche sur Hiroki. Maintenant il allait falloir marchander.
- On va pas tourner autour du pot plus longtemps. Qu'est ce que tu veux en échange ?
- Tu fais mes devoirs avec Yumi pendant 1 mois.
Je le regardais en rigolant en entendant sa proposition.
- Tu connais mes notes ? Je dis pas que je ne suis pas capable de faire un exo de CM2 mais bon si tu veux une bonne note t'adresse pas à moi. Moi je suis plutôt musique, déco, jeux vidéos...
A ces mots ses yeux s'agrandirent et d'un trait il fit sa proposition.
- Tu me files tous tes jeux vidéo pendant un mois...et si je suis bloqué tu me passes les niveaux bien sûr.
Redoutable le frangin.
- Marché conclu !
Quelques minutes plus tard j'avais les affaires, les clés, le bol était lavé sans être utilisé et des miettes de pain trainaient ça et là. Pas besoin de forcer mes talents en écriture Hiroki se chargerait de passer le mot à ses parents. Yumi se ferait vraiment tuer. Mais moi j'étais libre et ce que j'estimais comme le plus délicat était fait. Maintenant c'était à Jérémie de jouer.
Il était maintenant 6h50 et à peine avais je refermé la porte de Yumi que je vis de la lumière dans les autres chambres. La synchronisation était parfaite. Je flemmardais un peu ayant décidé de rentrer dans Kadic en même temps que les premiers élèves. J'appelais brièvement Jérémie lui signalant ma réussite et que la suite dépendait de lui. Les modulateurs de voix se révélaient toujours efficace et nul doute que Jérémie saurait être convaincant vis-à-vis des adultes concernés. Finalement j'entrais dans la cour de Kadic et me posais sur un banc. Tout s'était passé très vite depuis notre retour de Lyoko. J'eus soudains l'impression d'être envahi d'une irrépressible envie de dormir et de me laisser aller. Une fraction de seconde je m'endormis et je me revis aussitôt en train de plonger vers la mer numérique. Ulrich face à moi. Sauf que je savais ce qui allait se passer et je tentais d'ajuster mon tir. Celui-ci toucha Ulrich de plein fouet qui se dévirtualisa. Je poussais un soupir de soulagement. J'ouvris les yeux subitement et la réalité vint me frapper de plein fouet. Il fallait que ça change, il fallait les ramener. Les yeux humides et les poings serrés je montais vers la chambre de Jérémie.
- Me revoilà Jérémie ! Du nouveau ?
A peine retourné vers moi qu'il se lança dans le récit de sa découverte.
- C'est ce que je pensais, affirma t'il. Quand on tombe dans la mer numérique on ne meurt pas. Nos données sont justes...dispersées et stockées pendant un certain temps. Il faut donc les retrouver puis lancer la matérialisation.
- Ça veut dire que tu peux les ramener ? murmurais-je.
Je sentis une vague d'espoir me submerger et il fallut que je m'asseye. Mes jambes semblaient devenir du coton et je crus qu'elles ne me supporteraient plus très longtemps.
Son regard changea et je sus que ça ne serait pas aussi simple que ça.
- Quand Yumi est tombée il n'y avait que ses données à retrouver, le programme ne pouvait pas se tromper. Mais là...
- Ils sont 3, terminé-je à sa place.
- Oui, ce qui veut dire que je dois retrouver les données manuellement, et indiquer au programme une fois réinitialisé l'emplacement de chacun. J'en ai pour des jours entiers Odd.
J'eus la même impression que la veille d'un DS pour lequel je n'avais rien révisé : une immensité de choses restait à faire et j'étais démoralisé avant de commencer. Je fus coupé par Jérémie qui devait deviner mes pensées.
- J'ai déjà commencé à récupérer des données, ce sont celles d'Aelita les plus importantes pour le moment.
Il ne disait rien mais je devinais que la simple évocation d'Aelita le touchait plus que moi. Un lien les unissait depuis le début de nos aventures et bien que trop timide pour l'avouer il était plus qu'évident à mes yeux.
- Maintenant je pense qu'on devrait se préparer à une matinée normale. Les questions ne manqueront pas et il va falloir être prudent. Après le sport on reprendra ça et tu me diras si je peux t'aider.
Il acquiesça de la tête et nous prîmes le chemin des douches.
L'étape du petit déjeuner figurait sur notre feuille de route. Hormis le silence qui régnait à notre table nous ne laissions rien paraître et je mis un point d'honneur à finir mes croissants ...et ceux de Jérémie. Rien ne vint troubler notre repas et c'est avec soulagement que nous nous présentâmes au cours de sport. Dans les vestiaires personnes n'avait remarqué l'absence d'Ulrich. Nous savions tous les deux qu'une seule élève ferait la remarque et avant d'entrer dans la salle de sport je regardais Jérémie fixement.
- Je préfère te laisser la parole tu seras meilleur que moi, glissa t'il.
- Je pense aussi que c'est la meilleure solution ajoutais-je dans un sourire.
Un dernier regard, une profonde inspiration et c'était parti. C'est maintenant qu'il faut assurer.
Attention Kadic, vous allez voir le plus beau numéro d'acteur d'Odd Della Robbia, murmurais-je.
Jérémie m'adressa un sourire et quelques instants plus tard toute trace de mélancolie avait disparue de mon visage. Au lieu de ça un sourire étincelant. Et quelque secondes plus tard, celui de Sissi.
- Il est où MON Ulrich ?
- Comme TON intelligence : absent ! répliquais-je dans un grand sourire.
J'espérais qu'en y allant suffisamment fort du premier coup elle nous laisserait tranquille. Mais c'était sans compter sur l'attrait que représentait Ulrich.
- Odd, quand j'aurais besoin de toi, je te le ferais savoir. Là je m'adressais à Jérémie. Mais peut-être as-tu toi aussi des problèmes d'intelligence pour le remarquer ?
Sa réponse était cinglante et l'espace d'un instant je dus chercher mes mots.
- Il est malade, tout simplement.
Jérémie avait finalement eut le mot de la fin.
- Mouais c'est louche ça, Ulrich ne raterait jamais un cours de sport. Qui plus est il n'est jamais malade, ajouta t'elle suspicieuse.
- Oui mais ça, c'est parce qu'il n'a pas beaucoup dormi cette nuit, glissé-je avec un sourire. Tu sais ce que c'est que de rester au téléphone tard la nuit avec la personne qu'on aime, continué-je dans avec un sourire de plus en plus grand. Ah mais suis-je bête, non tu ne sais pas puisque ce n'était pas avec toi qu'il était au téléphone !
La victoire était totale et le regard qu'elle me jeta me fit espérer qu'on ne ferait pas du lancer de javelot en sport...sous peine d'être sa cible. Tout en la regardant s'éloigner j'entendis Jérémie discuter avec Jim et lui annoncer l'absence d'Ulrich. Le prof eu d'avantage l'air surpris par la présence de Jérémie que par l'absence de notre ami. Finalement cette matinée débutait bien.
A mon grand soulagement ce fut gymnastique et non pas javelot. Le genre de sport qui me convenait, tout en occupant suffisamment mon esprit pour oublier un peu la situation. Ce ne fut qu'au retour dans les vestiaires que la réalité me revint en pleine face. Tout comme j'enfilais mes habits j'eus l'impression de revêtir le poids de notre tâche. Les événements reprenaient possession de mon esprit et l'impression de liberté ressentie pendant le cours ne fut bientôt plus qu'un souvenir. Un regard à Jérémie me confirma que je n'étais pas le seul. Mais contrairement à moi le cours n'avait sûrement pas eu le même effet sur lui.
Le retour dans sa chambre fut silencieux. Ce n'est qu'une fois la porte refermée qu'il prit la parole.
J'ai bien réfléchi pendant le cours. Je pense qu'Aelita devrait être plus facile à retrouver que les autres...sa signature est, disons,... unique et il se peut qu'en un week-end je la ramène. Pour le moment c'est l'urgence mais je ne peux avancer qu'en travaillant à l'usine. Toi tu restes ici au cas où Jim ou quelqu'un d'autre passerait.
- Et je fais quoi ici ?
- T'inquiète pas pour ça j'ai du boulot pour toi, dit-il dans un demi-sourire.
En effet la somme de travail n'était pas négligeable. Des lignes de code à recopier minutieusement. Rapport à la matérialisation. J'en avais pour un moment et il allait me falloir beaucoup de concentration pour ne pas faillir à ma tâche.
Jérémie avait filé depuis deux heures et j'avançais péniblement. Le clavier m'était beaucoup moins familier qu'à lui et je cherchais encore mes touches. Pourtant je continuais inlassablement. Si je pouvais montrer le même acharnement aux cours...
Au moins je ne fus pas dérangé. Seul Jérémie m'appela. Je redoutais son appel et je ne fus pas déçu. Je ne voyais pas son visage mais au ton de sa voix je devinais l'effroi qui s'était emparé de lui. Il ne glissa qu'un seul mot synonyme d'échec : Xana.